Retour

Un crime à Polliat

Ce texte nous est adressé par Mr Jean Fossati Polliati de coeur
Il concerne une de ses lointaines aïeules Mme Josserand veuve Lambert

Extraits de l'audience du 27 Octobre 1899 de la cour d'assise de l'Ain

(source : Le courrier de l'Ain, chronique judiciaire du Samedi 28 octobre et du dimanche 29 octobre 1899)

                Audience ouverte le 27 octobre à 9 heures

        Polliat qui sert de cadre au drame, est un village voisin du chef-lieu, agréable, but de sortie dominicale, quelque chose comme un coin de banlieue plein de verdure, où s'évoquent seulement des gestes d'apaisement et de sérénité.
        L'accusé Barnoux est au banc des prévenus.

        Acte d'accusation:
    Le 16 décembre 1898, Mme Thévenard, femme de ménage de Mme vve Lambert, arrivait de bonne heure le matin reprendre son service. La porte était close, personne ne répondit; elle prévint en hâte M. Josserand frère de la victime qui fit forcer la porte de l'auberge. La veuve Lambert gisait sur le plancher d'une chambre au premier étage, les bras en croix, la tête fracassée dans une mare de sang. Des meubles ouverts démontraient que le vol avait été le mobile.
    Une brique à laquelle adhéraient des cheveux de femme gisait auprès du cadavre, dans la bouche on avait introduit en guise de bâillon, un chiffon rouge.
    M. Guillerminet, l'honorable maire de Polliat, avertissait le Parquet de Bourg qui se transporta sur les lieux pour procéder aux constatations d'usage.
    Le 16 décembre, dans la nuit, un individu se faisant appeler Mouvand descendait à l'auberge Charpy à Bourg. Son allure paraissait louche et mit la police sur sa piste qui retrouva Barnoux de son vrai nom à Belfort le 20 Décembre. On retrouva sur lui des effets de Mme Lambert et de feu M. Lambert et un billet de banque de 50 frs, portant au dos une maculature (sic) de sang. Quatorze jours après le crime, on découvrit dans le fenil de l'auberge, caché dans la paille, un complet marron couvert de sang, vêtements de Barnoux. Barnoux avait été employé chez M. Mathieu, boucher, voisin de Mme Lambert.
    Il comparaît aujourd'hui pour vol et assassinat de la veuve Lambert.

        L'accusé Barnoux:
    Agé de 23 ans, il exerce la profession de garçon boucher, il est né à Saint  Jean le vieux (01) le 6 Avril 1876. Taille moyenne, teint du visage olivâtre, cheveux et sourcils d'un noir d'encre, une légère moustache. Les antécédents de Barnoux sont déplorables, inconduite, vol, chassé de chez sa mère, la grivèlerie succède au vol, il est condamné en correctionnelle à Bourg et à Belley.

        L'interrogatoire:
    Barnoux nie tout en bloc.

        L'audition des témoins:
    M. Guillerminet donne de bons renseignements sur la moralité de Mme veuve Lambert.
    M. Josserand, cordonnier à Polliat fit ouvrir la porte par le maréchal-ferrant. D'après lui, sa soeur était hantée par la crainte d'un vol et même d'assassinat.
    M. le Dr Groffiley après examen du cadavre et autopsie, a relevé sur la face quatre plaies dont deux étaient mortelles, pas de trace de lutte ni blessure, ni trace de coït récent.

                Audience du 28 octobre
        Suite de l'audition des témoins.
    La défense présentée par Me Charousset du barreau de Lyon demande l'acquittement de son client.
    Les débats sont déclarés clos par le président.

    Le jury se retire dans la salle des délibérations.
    Il en ressort quarante minutes après apportant un verdict affirmatif sur les questions de vol et d'assassinat. Les circonstances atténuantes ne sont pas admises, le jury écarte la question de préméditation.
                En conséquence, Barnoux est condamné à la peine de mort.
Barnoux sans aucun tressaillement, écoute l'arrêt qui le condamne.

    L'audience est levée à 5 heures.


            Un incident:

    Au moment où la sentence est prononcée, un cri retentit dans l'auditoire. Une femme tomba en proie à une violente crise de nerfs.
    Cette dame est la soeur de la victime, Mlle Honorine Josserand signalée déjà parmi les témoins. Les soins les plus empressés et les plus intelligents lui ont été prodigués par M. le Dr Savy. l'état de la malade n'inspire aucune inquiétude.

                                                   _____________________


        Louis Henri Barnoux
        Né le 15 Avril 1876 à St Jean le Vieux (01)
        Fils de Henri Barnoux, 40 ans, charpentier, domicillé à St Jean le Vieux et de Anthelmette Convert.

        Condamné le 28 octobre 1899 à la peine de mort, peine commuée en celle de Travaux Forcés à perpétuité par décret du 1er décembre 1899 (sous la présidence d'Emile Loubet) pour meurtre et vol concomitant commis le 15 décembre 1898.

        Embarqué le 16 mai 1900 à destination de la Guyane.
        Au bagne:
Bonne conduite, évadé le 27 septembre 1903, réintégré le 29 novembre 1903.
Interné de juin 1907 à juillet 1911.

        Décédé à Saint-Laurent du Maroni Cayenne le 10 mai 1923.

Jean Fossati, 2022